Autoportraits, confiné dans la cave / 29 mars 20

Depuis les premières fascinations, les premières traces sur le papier, c'est dans le silence des images que je me loge. C'est ce silence, cette absence des mots, des dires, des signifiés qui fonde ma recherche.
Je cherche à m'absenter de la grille qu'impose le langage entre moi et le réel – que je ne nie ni ne détruis.
Je suis un corps : cette affirmation ne signifie pas que je répudie les activités intellectuelles ou spirituelles. Elle annonce la possibilité d'un équilibre naïf – antérieur à la conscience de soi – et la possibilité d’une perception dénuée de principes ( : dans le silence des images, regarder le monde sans idéal, sans opposition).
Les paradoxes sont la part maudite du bon sens qui s'en effarouche et en ricane comme d’une énigme loufoque.
Les contradictions s'additionnent et révèlent l'objet/la chose dans son unité, son intégrité, son non-sens, son autonomie.
Les interprétations sont aussi nombreuses que les individus, chacun dans la chambre capitonnée de ses expériences, de ses références. De cet agglomérat de significations apparaît un moi convaincant pour qui l'habite et le nourrit, une identité communicante. Il se modèle et se structure jusqu'à la boursouflure, l'aveuglement, la dissociation douloureuse de soi et du monde.
Je pense au portrait de J. Genêt de Giacometti. Les traits s'accumulent, se croisent, s'enchevêtrent autour et dans le visage – qui devient portrait – qui se solidifie. Le portrait ne subit pas de réduction, ni de rapetissement, mais une densification – l'esprit cultivé ploie jusqu'à une matérialité originelle. Face à cet acharnement la psychologie relâche son étreinte.
Les traits jetés sur le papier ou la toile, fouette la matière jusqu'à ce qu'apparaisse l'os de Giacometti, le réel délivré – l'écriture d'avant l’écriture. Les dessins des grottes « préhistoriques » nous surprennent comme des nouveautés faites par de sales gamins.


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